Neutralité carbone : quelle feuille de route pour la filière automobile d’ici à 2030 ?

Neutralité carbone : quelle feuille de route pour la filière automobile d’ici à 2030 ?

7 juin 2023


Dans le prolongement de la présentation, le 22 mai 2023, par la Première ministre, Elisabeth Borne, de son plan de réduction des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030, la filière automobile a partagé, mercredi 24 mai, à l’invitation du Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, ses propositions pour la feuille de route de décarbonation de la filière automobile.


Afin de nourrir les travaux de la planification écologique dont les premières orientations ont été annoncées deux jours plus tôt par la Première ministre, Luc Chatel, président de la filière automobile, a présenté, mercredi 24 mai 2023, les propositions du secteur à Christophe BÉCHU, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Agnès PANNIER-RUNACHER, ministre de la Transition énergétique, Clément BEAUNE, ministre délégué chargé des Transports.

A l’instar des principales filières économiques, la filière automobile a élaboré au cours de l’année 2022 une proposition de feuille de route de décarbonation, en associant très largement les différents acteurs de la filière à travers une trentaine d’ateliers qui a mobilisé une centaine de participants (amont et aval, VP, VUL et VI). Ces propositions visent à fixer une trajectoire, identifier les freins à surmonter et les leviers à déployer pour accélérer la décarbonation et atteindre les objectifs de baisse des émissions de gaz à effet de serre de la France.

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Trois questions à Marc Mortureux, Directeur général de la PFA

Quels sont les enjeux de ce travail présenté par la filière au gouvernement le 24 mai dernier ?

Cette feuille de route s’inscrit dans le cadre des travaux de la planification écologique dont les premières orientations ont été annoncées la Première ministre le 22 mai dernier.

Ces propositions visent à fixer une trajectoire, identifier les freins à surmonter et les leviers à déployer pour accélérer la décarbonation et atteindre les objectifs de baisse des émissions de gaz à effet de serre de la France. Il s’agit d’offrir une vision très large des différents leviers identifiés pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris avec pour horizon la neutralité carbone en 2050 et le point d’étape intermédiaire de -55% pour 2030.

Aujourd’hui, l’empreinte carbone du transport routier est à 80% liées à l’usage des véhicules, et 20% à leur fabrication et fin de vie. L’électrification est évidemment le levier majeur. A l’échelon européen, l’objectif des 55 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2030 se traduit, pour l’industrie automobile, à « zéro émission de CO2 » à l’usage en 2035. Il s’agit donc de faire 2 fois plus en 10 ans que ce qu'on a fait en l’espace de 30 ans. Un défi considérable.

En 2021, la production de véhicules neufs et l’usage du parc ont émis 121 millions de tonnes de CO2. Nous avons proposé deux scénarios de réduction de ces émissions. Le premier s’appuie sur l’électrification croissante du parc et estime que ces émissions de CO2 seront réduites de 45 % en 2040 puis de 68 % en 2050, jusqu’à se limiter à 39 millions de tonnes de CO2. Le second scénario, le plus volontariste, repose sur une hypothèse de baisse de 16 % du kilométrage parcouru en 2040, et offre des baisses de 72 % en 2040 et de 81 % en 2050, soit 23 millions de tonnes de CO2.

Suffit-il de basculer du thermique vers l’électrique pour atteindre nos objectifs ?

Non, et c’est ce qu’illustre clairement nos travaux. Les scénarios présentés présupposent un alignement des conditions, qui pour l’instant ne sont pas vraiment là. Mais nous sommes prêts !

La filière est en ordre de marche pour avoir la capacité de produire les véhicules électriques, mais le vrai défi est de convaincre le consommateur. Nous avons ainsi rappelé l’exigence de rendre le véhicule électrique accessible en continuant à accélérer sur les infrastructures de recharge, mais aussi à travers le maintien d’un niveau soutenu d’aide à l’achat.

Nous avons également souligné l’importance de travailler sur le renouvellement du parc existant, l’alimenter autant que possible en carburants bas carbone, allonger la durée de vie des véhicules et actionner tous les leviers de l’économie circulaire…

Enfin, au-delà de la seule question de l’usage, quelle approche avez-vous réservé aux émissions liées à la production ?

Nous déplorons que la réglementation européenne sur le CO2 ne repose que sur les émissions lors de l’usage du véhicule. Une vision globale sur l’ensemble du cycle de vie est indispensable.

Actuellement, l’empreinte CO2 pour produire une voiture du segment C électrique est de 11 tonnes d’équivalent CO2 contre 6 tonnes pour un modèle thermique comparable.

Parmi les matériaux constituant ces 11 tonnes d’émission, les cellules de batteries sont les plus émissives et représentent 38 %, soit 4,18 tonnes de CO2. Celles-ci sont produites principalement en Chine, majoritairement fossile.

Les autres matériaux : l’acier (19 %), les alliages d’aluminium (27 %), les plastiques (9 %), le verre (1%) et divers (6 %).

Le point fort de la France est cette énergie décarbonée dont elle dispose grâce au nucléaire, cela rend pertinent la localisation de la production, le plus en amont possible dans la chaîne de valeur. Les règlementations et les logiques d’investissement doivent en tenir compte. C’est pourquoi nous en avons fait l’un des volets forts des propositions présentées au gouvernement.


Source : Lettre Analyse et Marchés de la PFA & pfa-auto.fr